« Les escroqueries et infractions économiques et financières ont augmenté de 24 % entre 2012 et 2016 », soit davantage que la hausse des atteintes aux biens ou des atteintes à l’intégrité physique des personnes, relevait la Cour des comptes début mars. Un constat partagé par les députés Ugo Bernalicis (La France Insoumise) et Jacques Maire (LREM), auteurs d’un rapport d’information consacré à la lutte contre la délinquance financière, qu’ils rendent public ce jeudi.
« Une délinquance de masse »
Cette délinquance, écrivent-ils, est « une délinquance de masse, frappant une proportion importante de la population avec des faits parfois individuellement d’une gravité relative mais collectivement très lourds financièrement ». Dans le détail, ils notent, par exemple, que près de 409.000 infractions et escroqueries économiques et financières de tous genres ont été enregistrées par le ministère de l’Intérieur en 2018, soit une hausse de 20% sur les cinq dernières années.
Mais l’ampleur du phénomène, incluant l’escroquerie à la carte bancaire, la fraude fiscale ou encore le détournement de fonds et la corruption, demeure globalement impossible à quantifier, parce que « chaque ministère et service a ses propres données », et parce que même le ministère de la Justice ne dispose pas de statistiques précises mesurant la délinquance financière, ce qui, selon les deux députés, est « révélateur d’un degré de priorité relatif ».
8 x 4 = 32
Simple catégorie au sein de cet ensemble de délits, la fraude fiscale symbolise à elle seule les failles du dispositif législatif, dont profitent allègrement les délinquants. Selon les estimations du syndicat Solidaires Finances Publiques, les pertes liées à ce type de fraudes s’élèveraient entre 80 à 100 milliards d’euros par an. « Il ressort de ce tour d’horizon que la délinquance financière est un phénomène hétérogène, en croissance. Mais bien que récemment réorganisée pour y faire face, la politique publique risque la thrombose (un caillot obstruant un vaisseau sanguin, ndlr) », expliquent les deux rapporteurs.
En cause, selon eux : l’éclatement des services entre la police judiciaire, la gendarmerie, les douanes, les finances publiques. En tout une quinzaine d’échelons, dont certains se font directement concurrence. En outre, « les effectifs de la Direction générale des finances publiques (DGFiP) ont baissé de 17 % de 2009 à 2016, soit une baisse de 2000 agents par an ». Même son de cloche du côté du Parquet national financier (PNF) et de l’Office central de lutte contre la corruption et les infractions financières et fiscales, créés en 2014 dans la foulée de l’affaire Cahuzac, dont le nombre de dossiers augmente tandis que les effectifs diminuent. À titre d’exemple, le rapport souligne que les 18 magistrats du PNF, censés instruire chacun « huit affaires de grande complexité », se retrouvent en réalité à en gérer 32, soit quatre fois plus que prévu initialement !
« La lutte contre la délinquance financière est aussi un facteur de cohésion sociale. »
Enfin, les deux députés formulent, en conclusion de leurs six mois de travail, 25 propositions chocs pour lutter plus efficacement contre cette délinquance, telles que se doter d’un service interministériel de lutte contre la délinquance financière, offrir aux lanceurs d’alerte un soutien financier et un accès facilité à un emploi public, ou encore de rendre possible à tout un chacun de porter plainte en ligne contre tout type d’escroquerie subie sur Internet.
Enfin, les deux députés formulent, en conclusion de leurs six mois de travail, 25 propositions chocs pour lutter plus efficacement contre cette délinquance, telles que se doter d’un service interministériel de lutte contre la délinquance financière, offrir aux lanceurs d’alerte un soutien financier et un accès facilité à un emploi public, ou encore de rendre possible à tout un chacun de porter plainte en ligne contre tout type d’escroquerie subie sur Internet.
« La lutte contre la délinquance financière ne se résume pas à un enjeu de politique pénale et de finances publiques ; elle est aussi un facteur de cohésion sociale, enfoncent-ils, dans une allusion indirecte au mouvement des Gilets jaunes. En effet, l’impunité réelle ou supposée des délinquants en col blanc tend à discréditer l’idée de justice quand, en parallèle, l’administration fiscale et le juge pénal sont très fermes envers le délinquant lambda. »